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Couloir Ouest du Col Emile Rey
Couloir Ouest du Col Emile Rey Mercredi 1er Juin 6h30 Pierre et moi partons en direction de ...
Le voyage, c’est la découverte, la découverte, c’est l’aventure, l’aventure, c’est l’incertitude, et l’incertitude, c’est la liberté…
Donner du sens à la pratique du ski n’est pas facile, surtout quand on n’inscrit pas sa pratique dans une nomenclature performative et où les objectifs ne sont que des hypothèses, des idées ou des opportunités pour partager des bons moments entre amis.
Avec ce voyage, nous rêvions de skier loin de la foule dans ces montagnes, de partir découvrir de nouveaux horizons, peut-être des couloirs, des pentes raides ou des itinéraires sauvages en ski de randonnée.
Le rêve a été surpassé par la réalité et la Norvège nous a livré ses plus beaux bijoux.
Quelques images aux drones à visionner pour donner envie…
Depuis quelques années me trotter dans la tête l’idée d’aller explorer cette région de Norvège beaucoup moins courue que le comté du Troms ou les Lofoten.
Après quelques recherches, je me suis rendu compte que ce secteur (assez vaste) regorgé de magnifique sommet et de couloir dont certains avaient été découverts par le défunt Andreas Fransson, célèbre skieur de pente raide et freerider scandinave qui avait défriché des itinéraires partout dans le monde.
Le rendez-vous était pris pour ce mois de mars 2024 avec une équipe de choc réunissant des personnalités dont l’unique point commun était l’envie de skier et de découvrir cette magnifique région quelles que soient les conditions de neige.
Nous installions donc, notre camp de base non loin de l’aéroport d’Evenes dans une charmante cabane au pied d’une montagne le Litletinden qui fût notre première randonnée sur site en arrivant la veille au soir.
Les conditions étaient incroyables, mais cela n’allait pas durer en raison du vent et de la météo capricieuse annoncée qui allait faire de la pluie, de la neige, du vent et un peu de soleil.
Nous avions épluché les topos et repérer un magnifique couloir qui faisait la couverture d’un topo de ski en norvégien, ce couloir, c’était le « Gangnesrenna » , juste la photo nous fasciner, nous interroger sur ce fameux couloir dont la réputation en Norvège est assez élogieuse, c’est vraiment une rivière qui descend entre 2 parois.
Il n’est pas extrême par sa pente, son inclinaison ou sa technicité… c’est une juste une merveille unique au monde qu’offre la nature au passionné de glisse que nous sommes.
Un matin, les conditions nous paraissent plus clémentes et nous décidons de tenter l’aventure, direction le fjord de Sørskjomen, durant le trajet nous scrutons les falaises qui bordent cet immense fjord, l’ambiance est à la fois sévère, car la météo n’est pas si belle, mais nous sommes excité de voir ce que ce couloir de 1 100 m qui plonge sur le fjord de Skjmbotn va produire comme effet visuel dans nos esprits lorsque nous serons en face, on a presque l’impression de chercher le graal…
Lorsque la « bête » se dévoile enfin, nous observons aux jumelles l’itinéraire, la rampe sommitale nous interroge, y aura-t-il de la glace, assez de neige ? Les corniches semblent énormes, finalement à force d’observation et de confrontation aux informations que nous avions déjà au sujet du Gangnesksla nous comprenons que les conditions risquent d’être vraiment incroyable, et même dantesque, il n’y a aucune trace humaine et la neige descend jusqu’au fjord.
Nous décidons de ne pas remonter dedans pour s’épargner le brassage de la possible neige fraîche ramené par le vent à l’intérieur du couloir, nous faisons donc la voie « normale » jusqu’au sommet pour rentrer dans le couloir « Gangnesrenna » nom donné par Andréas en référence au fleuve « Gange » en Inde qui est une rivière sacré.
Après quelques heures d’effort, nous voilà arrivées au sommet, un beau dôme avec un panorama sur les montagnes environnantes, c’est vaste, il fait froid, il y a du vent et on n’a pas envie de rester au sommet.
Nous décidons de partir à la recherche de l’entrée du couloir que nous ferons en vue, nous la trouvons sans aucun problème et après un bref « agressive testing » avec une corde le verdict tombe : il y a une poudreuse légère d’une qualité incroyable, nous ne décelons aucun signe d’instabilité, de plaque ou de transport de neige par le vent, c’est tellement encaissé que le vent a simplement rempli le couloir que pour nous.
Yohan en snowboard ouvre le bal avec Julie qui le suit en ski, à entendre leur cri d’extase, on comprend de suite que c’est dingue.
Hugo, Steph et moi-même, passons derrière sur cette première partie, le ski est facile, on pourrait descendre encore plus vite et atteindre des vitesses dignes des plus grandes descentes, mais on ne s’énerve pas, la pente est quand même à 40° et on se méfie des possibles pièges.
La descente est un vrai bonheur, on passe à tour de rôle devant pour faire notre trace, nous avons tous conscience que les conditions sont uniques et sécurisantes, il y a un sentiment de gratitude les uns envers les autres, mais aussi envers la nature et la vie que nous permet de vivre cet instant dans ce lieu.
Le bas du couloir est incroyablement enneigé, et nous savons que c’est la partie la plus compliquée lorsque les conditions sont médiocres, la glace n’est pas loin par endroit, mais nous arrivons sur le cône d’écoulement final du couloir où la neige devient plus difficile.
Arrivé à la plage au bord du Fjord après un court déchaussage, c’est la fête ! Nous sommes habitués à skier des couloirs dans les Alpes, mais celui-là est l’alchimie parfaite de ce que nous étions venues chercher ici dans ce pays que j’affectionne tellement.
Le retour au village de Sorskjomen se fait le long du fjord, l’ambiance est à la contemplation et nous espérons pouvoir skier à nouveau un joyau de ce type.
Les jours d’après, sont médiocres et nous nous occupons sur quelques itinéraires en forêt à l’abri d’une vilaine tempête, le vent et la neige sont de la partie, mais aussi, car le risque d’avalanche semble être assez important.
En nous baladant nous repérons un autre couloir qui semble très skiant sur un sommet le Kongsviktinden, il est situé en face de l’île de « Tejeldsund » , l’endroit est juste incroyable, c’est une pyramide, le matin même nous tentions un itinéraire qui permettais de passer une caractéristique géologique, une sorte de micro-chorum, malheureusement celui-ci fût bouché par l’enneigement abondant de cette année, le regel était mauvais, la neige humide, et on a passé du temps à trouver une hypothétique faille ou faiblesse pour creuser la neige sans succès, tant pis on reviendra jamais mais au moins on aura essayé.
Après une brève pause casse-croûte nous revoilà parti en direction du Kongsviktinden
Ce sommet est un promontoire rocheux offrant encore une fois de plus une vue incroyable sur le fjord, l’ambiance est aérienne au sommet et la lumière ambiante orangée du soir est une invitation à la contemplation.
Ici encore, nous allons réaliser le couloir à vue.
Une traversée en versant nord dans des pentes bien chargées nous permet de regagner l’arête sommitale qui nous conduira à l’entrée du couloir, c’est spectaculaire sans être difficile, la neige est une sorte de sorbet regelé formant des lamelles.
La neige va être un peu dure, mais le grip est bon, ça skie, mais ce n’est pas du caviar.
Nous arrivons toutefois à apprécier l’ambiance, la vue, l’environnement et ce couloir fait quand même 800m.
Arrivée en bas, une grande traversée nous ramène ski aux pieds au bord de la route , il fait quasiment nuit, il ne reste plus qu’à savourer une saucisse dégueulasse dans l’une des nombreuses stations-services du coin qui offre une restauration médiocre, dommage pour un si beau pays de ne pas être plus raffiné en termes de gastronomie, mais bon tout ça ce sont des problèmes de riches occidentaux !
Situé non loin de Harstad, ce secteur au-dessus du fjord de Øysundet est incroyablement intéressant, nous y avons trouvé des paysages incroyables et nous avons même fait la rencontre de dauphins lors de notre retour. Quoi de mieux que de skier des itinéraires incroyables et de pouvoir aussi admirer ces espèces rares de mammifères marins.
Une fois de plus nous ne pensions que la neige ne serait pas si bonne en raison des pluies des jours précédents et donc nous nous étions fixé comme objectif de remonter par un couloir peu raide, parcourir l’arête et d’aviser au sommet en fonction des conditions rencontrées.
Arrivé au Cairn sommital, on a une vue plongeante sur le magnifique couloir principal qui nous attire immédiatement.
Nous décidons de tester la pente et de voir ce qu’il en est réellement.
Nous imaginons pouvoir skier le couloir Øst Mellomrenna, la pente du haut est un bel entonnoir à 50°d’inclinaison, puis le couloir devient moins raide et rectiligne entre les rochers, il y a avait une corniche et nous avons une fois de plus utilisé la corde pour assurer le premier de cordée à ski pour qu’il puisse tester la qualité de la neige, nous avions peur de trouver de la glace sous une poudreuse fine et légère en raison de la pluie des jours précédents.
Finalement le grip était bon et la petite couche de neige fraîche a bien arranger l’affaire, c’est parti pour un beau couloir de presque 500 m !
Nous sommes encore sous le charme et la sidération de la quiétude de ces montagnes, il n’y a pas âme qui vivent, on ne croise personne et le casse-croûte au bord du fjord face à une imposante chaîne de montagne est encore l’occasion de rêver à d’autres itinéraires.
Lors des journées de mauvais temps, nous en avions profité pour faire de bons repérages : identifier les accès, les lieux, observer avec les jumelles les possibilités, étudier en détail les cartes et topos.
Lors d’un périple, nous sommes passées devant le fameux « Kulhornet » là encore, c’est Andreas Fransson qui ouvre la voie en skiant le couloir de la face Ouest et on vu la météo annoncée avec du vent et de la neige modérée, on se dit que nous serons probablement plus abritées dans cet entonnoir que sur de grandes pentes sans visibilité.
Au final, la météo s’est complétement planté, la journée est quasi printanière, et la neige une fois de plus poudreuse, mais avec une légère croûte sur le dessus.
Nous remontons cette fois-ci l’itinéraire jusqu’au sommet, de nombreux passages sont en « dry-ski », c’est-à-dire qu’on va skier sur des dalles de rocher recouvertes de neige, hormis ces passages, le reste semble en très bonne condition, la pente est à 45° soutenues, voir 50° à quelques endroits, la largeur varie entre 3 et 4 m par endroit.
Nous sortons au sommet et admirons la magnifique vue sur le Stetind, la célèbre montagne de Norvège.
Nous hésitons un peu à descendre ce couloir, nous sommes 4, les premiers bénéficieront d’une bonne neige, mais les derniers ça sera des marches d’escalier à cause des virages sautés, et il y aussi les quelques passages techniques sur les dalles.
Finalement, nous décidons de remettre sur quelques mètres les crampons pour désescalader les dalles et ne pas risquer de s’envoyer du « spleuf » les uns sur les autres et que tout le monde puissent skier.
La descente est encore d’anthologie, je n’avais jamais skié une telle particularité géologique, bien que la grande faille du Pécloz dans les bauges fasse partie de mes fentes raides préférés, je trouve celle-ci raide et très esthétique.
C’est le dernier jour de notre aventure en Norvège et nous finissons par ce couloir alors que franchement, la météo n’était pas de la partie, par chance nous avons saisi quelques fenêtres.
Là encore, la gratitude, la reconnaissance et le respect envers les forces de la montagne est de rigueur, nous mesurons la chance que nous avons eue pendant ce séjour de pouvoir profiter de ces descentes d’exceptions.
Merci aux compagnons d’aventure: Yohan, Stephanie, Hugo et Julie.
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